Le prix du pétrole en baisse : une bonne nouvelle ?
La chute des prix du brut a ramené le baril aux alentours de 40 US$ (cours du WTI à New York le 19 août) contre plus de 95 US$ dix-huit mois auparavant. Plusieurs instituts de conjoncture prévoyaient même, fin août, un retour des prix à leur niveau de 2004.
Les causes de cette chute sont largement connues.
Elles sont d’ordre conjoncturel : brutal ralentissement de la demande chinoise, atonie de la croissance en Europe, économies en berne dans plusieurs grands pays émergents.
Elles sont techniques : dynamisme de la production nord-américaine de bruts non conventionnels qui a redonné aux Etats-Unis une large indépendance en matière d’hydrocarbures. Le résultat se lit dans les chiffres des stocks américains diffusés en août dernier, excédentaires de plus de 20 % à la moyenne des cinq dernières années pour la période de référence.
Elles sont géopolitiques : l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial, a entamé il y a un an une guerre des prix qui l’a conduite à vendre de plus en plus, entraînant derrière elle le reste de l’OPEP et faisant exploser les quotas de production. Au total, près de 1,6 million de barils/jour supplémentaires sont venus inonder le marché depuis novembre 2014. S’ajoutent les bruts des pays non membres du cartel (Russie, notamment). Enfin, le marché escompte un prompt retour du pétrole d’Iran pour cause de levée de l’embargo international, suite à l’accord de Genève cet été, statuant sur le nucléaire iranien.
Les conséquences sont positives pour les pays importateurs où s’opère un transfert massif de richesses. Pour la France, il représente un gain de 0,2 point de PIB pour une baisse du prix du baril de 20 US$ selon l’OFCE et le phénomène est similaire pour les autres économies de l’UE. Et l’OFCE de prédire un surplus de croissance de 0,6 % pour la zone Europe en 2015.
Ce mouvement va de pair avec une montée des périls économiques dans certains pays producteurs, au premier rang desquels le Venezuela, la Russie, l’Algérie et le Nigeria. Mêmes les pétromonarchies du Golfe souffrent, obligées de puiser dans leur bas de laine pour maintenir leur politique de maintien de la paix sociale à coup de dollars.
Si l’on excepte les gains potentiels de croissance pour les consommateurs, ce nouveau contre-choc pétrolier intervient au plus mauvais moment dans un monde déjà partiellement déstabilisé par les différents conflits du Moyen-Orient, le terrorisme et la récession économique des grands consommateurs.
Il se manifeste également à un instant crucial où la plupart des nations, ayant pris conscience du caractère inéluctable du réchauffement climatique, doivent se réunir à Paris (30 novembre-11 décembre 1015) pour décider de mesures concrètes destinées à réduire les émissions de CO2, donc de freiner la consommation des combustibles fossiles. Dans cette perspective, ce n’est peut-être pas une bonne nouvelle qu’ils soient redevenus très bon marché.
Etudes
. Vers un nouveau modèle pour les marchés électriques européens, Fabien Roques, Dmitri Perekhodtsev, Charles Verhaeghe
. Le secteur de l’énergie en Afrique subsaharienne : état des lieux et perspectives, Rebecca Major, Ergen Ege
Tribune libre
. De la communauté européenne de l’énergie à l’Union de l’énergie, Jacques Delors, Jean-Arnold Vinois
Analyse
. Electricité : les mécanismes de capacité en Europe, Christine Le Bihan-Graf, Catherine L’Hostis, Angelos Souriadakis
Points de vue
. L’accord sur le nucléaire iranien renforce le rôle de Téhéran dans les hydrocarbures, Samuele Furfari
. La surévaluation des surcoûts des énergies renouvelables, Guy Brassard
Géopolitique
. Un lac chinois en mer de Chine méridionale ? Jacques Baudouin
Histoire
. L’accident de Three Mile Island, une première pour l’énergie nucléaire, Yves Bouvier
Profil énergétique
. Panama